LA PROPHECIE du Roi CHARLES VIII
La saincte
ampolle de renom Que Dieu transmist à sainct Remis Pour sacrer de celle
unxion Les roys françoys et filz du lis; Puis après, l'estendart
jolis, Dit l'oliflant, cela est vroy, Pour desployer contr'
ennemys Infidèles à nostre loy; Ces dons procèdent de deité, Lesquelz,
je tiens sans nul esmoy, Au nom de la saincte Trinité, Batailleront fort
pour la foy.
Dieu plain d'amour, d'affection, Au roy françoys si a
transmis Une forte opéracion, Miraculeuse, je le dis; Des escrouelles
ont guéris, Et n'y mectent sinon le doy, C'est ung bel don et de grant
pois. Qui ne m'en croit l'on veoit de quoy. Pourquoy ceste belle
dignité Et d'autres qu'a le présent roy, Au nom de la saincte
Trinité, Batailleront fort pour la foy.
Prince, le roy s'en va, bien
le voy. Avec la saincte Divinité Qui sera tousiours avec soy ; Au nom
de la saincte Trinité, Batailleront fort pour la foy.
Maison royal
plain de delis Plaine de gente gentilesse, Faisant fleurir en delis,
lis, Par belle noble noblesse Regardons la haulte haultesse De
Charlemaigne peu à peu, Qui grant payens par prou prouesse, Avoit non pas
en vain vaincu. |
Roy sainct Loys, allant alla, Se me semble,
semblablement, Et par sa bataille tailla Ces Turcs, forte gent,
gentement. Puis comme hardy hardiment, Devers Jhésus
Jhérusalem,
Dévot, dévocieusement, Oraisons dit fin à Amen.
France par tout est renommée, Nommée par grant excellance; Lance
de France pour armée, Armée pour sa redoubtance; Doubtance on a de sa
puissance, San ce toucher ne l'esprouver; Prouver yra la
mescréance, Créance j'ay de l'y trouver.
Icy me taiz pour le
présant, Pour non vouloir donner ennuy A plusieurs gens cecy lisant, Cy
j'ay prolixité fouy. Dieu a transmis jusqu'aujourd'huy En France grans
biens auctentiques, Vaillances, los plus qu'à aultruy ; Tout ce verrez par
les cronicques.
Cy ne parleray seulement Que du temps courant à briefz
mos, Selon mon pouvre entendement, Qui n'est pas trop en bon repos ; Et
pour revenir à propos De nostre roy très chrestien, Qui loing s'en va o
ses suppos, Pour notre foy et public bien.
Que pencez vous de ce roy
Charles? Combien qu'il soit jeune de temps, C'est le plus noble en fait
d'armes Qui jamais fust depuis mil ans; Onc roy de France n'eust le
sens Ne la prouesse de cestuy; Ny d'autres roys, fussent cinq
cens, N'entreprendront ce qu'il fait huy. |
Cecy ne dis, n'aucun langaige Pourcouraiger
nostre bon sire, Car il a plus de bon couraige Que ma langue ne sauroit
dire. Tout papier du monde escripire II ne sauroit de notre roy Le
vaillant cueur qu'a pour destruire Les ennemis de nostre foy.
O très
noble duc d'Orléans, De Mylan, aussi de Valoys, Contre ces villains
mescréans Soyez vaillant à ceste foys, Car vous l'onneur du roy
françoys Augmenterez fort, et de France; Et ces Juifz, Marrans,
Turcoys Ruerez à pointe de lance.
Très noble conte
d'Angolesme, Aussi noble duc de Nyvers, Vous noble conte de
Vendosme, Et gentil conte de Nevers, Par vous les ennemys
parvers Viendront à vraye obéissance. Donnez à tors et à
travers, Monstrez qu'avez sur eulx puissance.
Très gentil conte
d'Allebret, Aussi noble prince d'Orenge, Vueillez vous y porter de
het, Que les Françoys en ait louenge; Et vous, noble conte
d'Avranche, Asteure est temps, à mon advis, Frapez sus, mectez-vous en
renge, Et gaignerez honneur et pris.
Très gentil conte de
Bouloigne Et si ne fault pas oblier Le noble bastard de
Bourgoigne, Tous ensemble vous veulx prier Cy vous souviégne
d'Olivier, De Rollant et des pers de France Des quatre filz Aymon tant
fier Qui furent plains de grant vaillance. |